
En janvier 2014, Grenoble Ecole de Management affichait un nouveau logo, aux couleurs de ses performances et de ses orientations. Caroline Cuny et Marianela Fornerino, professeurs au département marketing à GEM, et Julien Grobert, ancien assistant de recherche à GEM, aujourd’hui Maître de conférences en marketing à l’IAE de Toulouse, ont analysé le processus d’acceptation de la nouvelle signature de l’école, pendant 3 ans. Les résultats de leur enquête relèvent quelques préalables favorisant la congruence (ou l’adéquation) entre le nouveau logo et l’image de marque revisitée.
Caroline Cuny et Marianela Fornerino
« Rendez-nous notre Dauphin ! », tel était le slogan d’une poignée d’étudiants, enseignants, et partenaires de GEM, très attachés à la signature d’origine de l’école. De fait, en 2014, Grenoble Ecole de Management opérait un changement radical, quittant une identité à fort ancrage local – avec la symbolique du Dauphin -, pour endosser de nouvelles valeurs et ambitions.
Ce changement de logo visait notamment à intégrer les codes des business schools du top 20 européen, dont elle fait partie. En mai 2016, pour entériner le changement, GEM lançait une vaste campagne de communication. Objectifs : ancrer la marque comme référente, en France et à l’international, dans le champ du management technologique, de l’innovation et de l’entrepreneuriat. Et, affirmer une approche distinctive des enseignements, ayant un impact sur les entreprises, et au-delà, sur la société.
La résistance au changement : une composante humaine
« La résistance au changement est classique chez les êtres humains, même si cette inclinaison est plus ou moins forte selon les individus, note Caroline Cuny. Car, il faut garder à l’esprit que cette résistance au changement est liée à la familiarité et à l’attachement à la marque. C’est ainsi que plus les individus sont familiers de la marque, plus le changement de logo peut induire une surprise négative.
D’où la nécessité de valider, en amont du changement, les éléments de perception de la congruence du nouveau logo avec l’image de la marque. » Pour GEM, comme pour d’autres marques, il s’est avéré que les clients les plus attachés à la marque témoignaient d’un plus fort attachement à l’ancien logo. Alors, comment contourner cette constante ?
Tester les éléments de congruence en amont du changement
Pour pallier les écarts de congruence entre le nouveau logo et l’identité d’une marque, l’idéal est encore d’impliquer le « consommacteur » en amont du changement. Objectif : limiter au maximum l’effet surprise, auprès d’un public précédemment conquis à la cause de la marque. C’est ainsi que ce décalage de perception devra être géré par les marketeurs, via une stratégie de communication amont (et parfois en aval), visant à expliquer le changement et les raisons du changement.
Autre approche possible : tester le nouveau logo auprès d’un échantillon représentatif des différentes cibles de la marque. Dans ce cas, une communication d’envergure sur les réseaux sociaux est particulièrement opportune. Objectif : mobiliser le public concerné, en informant de la démarche et en l’invitant à s’impliquer dans le processus de création. Cette initiative permet de réduire nettement le fameux « effet surprise négatif », une fois le logo validé.
A GEM, des tests confirment l’adéquation du logo avec les valeurs de la marque
Caroline Cuny, Marianela Fornerino et Julien Grobert ont conduit une étude au long cours sur la perception des éléments de congruence entre les nouvelles valeurs véhiculées par la marque et le nouveau logo de GEM. De premiers tests ont été réalisés, en juin 2014 (soit 6 mois après le lancement du nouveau logo de l’école), auprès d’étudiants admissibles à GEM, et donc peu familiers de la marque.
Parallèlement, une série de tests a porté sur des étudiants de dernière année, plus impliqués et attachés à l’école. Les résultats ont d’abord conclu à une faible congruence du nouveau logo avec les valeurs de la marque. Cependant, l’étude a été poursuivie de 2014 à 2016 et les résultats sont probants : la congruence s’accroît au fil du temps. La démarche de changement de logo de GEM est confirmée.
Quelques « flops » chez les plus grands !
Toutes les marques, y compris les plus prestigieuses, ont été confrontées à de vives résistances au changement. Leur point commun : ne pas avoir fait acte de pédagogie, en amont du changement. Toutefois, la façon de gérer ces dérapages incontrôlés n’a pas été de la même nature chez toutes. C’est ainsi que GAP, qui avait changé radicalement de logo en 2010, a dû faire marche arrière quelque 7 jours plus tard, au vu des réactions virulentes de ses clients. La marque n’avait ni anticipé, ni expliqué en amont les fondements du changement.
Autre exemple : Apple et Starbuck ont suscité une levée de bouclier lors du changement de leur logo. Toutefois, plutôt que de faire marche arrière, les deux marques référentes ont fait le choix d’une action pédagogique en aval, pour expliciter les raisons du changement.