
Face à la Silicon Valley, l’Europe peut-elle prendre le leadership de la révolution digitale ? Tel est le thème de l’une des tables-rondes qui se tiendra du 14 au 17 mars prochain, dans le cadre du 10ème Festival de géopolitique de Grenoble. Engagé dans la transition numérique de ses métiers, le groupe Mazars, partenaire de Grenoble Ecole de management, est partie-prenante des débats qui interrogent la prééminence mondiale des Etats-Unis depuis près d’un siècle.
Entretien avec Cédric Haaser, associé chez Mazars, sponsor de l’innovation pour l’ensemble du groupe.
Quel est votre diagnostic de la répartition des forces en présence sur le marché mondial des technologies du numérique ?
De toute évidence, l’Europe a pris du retard. J’observe toutefois deux indicateurs clés : le monde numérique européen a décidé de réagir, en particulier en France, où il existe un terreau favorable. La ligne politique d’Emmanuel Macron favorise l’émergence d’entreprises de l’IT (Information technologies), et les accompagne à différents niveaux – fiscal notamment –, via le mécanisme du Crédit impôt recherche qui attire, de fait, de grands groupes en France. Ce mouvement est par ailleurs soutenu par la formation d’ingénieurs français de haut niveau.
Beaucoup sont partis entreprendre aux Etats-Unis, notamment dans la Silicon Valley. Ce qui est perceptible, aujourd’hui, c’est l’accélération d’un mouvement entrepreneurial, en Europe. C’est très positif ! Autre facteur clé : le développement de l’Intelligence artificielle (IA), qui est très prometteur en France. D’où la volonté du gouvernement de lancer un chantier sur l’IA, piloté par Cédric Villani. La réflexion associera les acteurs universitaires (pôles de recherche et recherche académique), les start-ups et les grands groupes. Objectifs : identifier les forces et concentrer les énergies.
Et, au-delà, fédérer les volontés afin de déceler les « niches » pertinentes, qui seront porteuses de valeur. Enfin, un autre élément s’est concrétisé ces cinq dernières années pour les entreprises innovantes : l’accès grandement facilité au financement. Les initiatives comme la French Tech par exemple… contribuent à ce mouvement d’ensemble. L’une des meilleures illustrations récentes de la capacité de leadership technologique, à l’échelle européenne, est sans conteste le lancement de Galileo, le GPS européen, porté par l’Agence spatiale européenne.
Les futurs acheteurs du système de positionnement par satellite, concurrent direct des GPS américains, ont confiance en la gouvernance de l’Europe. C’est sain et c’est porteur !
Quels sont donc les prémisses concrètes de cette révolution numérique dans votre cœur de métier ?
Deux grands thèmes sont prégnants : la simplification et l’automatisation des process de l’audit, la comptabilité et la fiscalité. Ces technologies de robotisation, très innovantes, sont aujourd’hui accessibles et d’une grande rapidité de mise en œuvre. Dans le domaine du droit, c’est l’avènement des technologies de l’intelligence artificielle (IA) qui domine, afin d’analyser et de produire des contrats assistés par ordinateurs. Mais, au-delà, l’enjeu de nos métiers visera à donner du sens aux data de nos clients, afin d’apporter une réflexion analytique.
Notre rôle consiste donc à tirer le meilleur pour nos clients, via le « data analytics », pour mieux comprendre les facteurs de performance, optimiser les coûts, les niveaux de marge, déceler les process défaillants… Objectif : gagner en lisibilité et prodiguer un conseil stratégique sur ce qui fonctionne bien, ou pas, dans l’entreprise.
La révolution digitale et l’IT sont aujourd’hui des sujets de prédilection pour de nombreuses entreprises, petites et grandes…
Tout à fait. Le groupe Mazars a pris l’option, très tôt, de considérer la révolution digitale et numérique comme un sujet d’opportunité. Son objectif : favoriser la transition et soutenir la transformation des métiers de nos clients. Face aux GAFA de l’audit, Mazars – 1,5 milliards d’euros de CA consolidés en 2017, contre 500 M€ en 2005 –, n’adopte pas de posture défensive ou de riposte, mais ambitionne au contraire de faire bouger les lignes… pour faire avancer ses clients… et se développer. C’est la preuve que c’est possible !
Le groupe Mazars est partenaire de GEM dans le cadre du 10ème Festival de géopolitique, et partie-prenante des débats qui porteront sur les leaderships de la scène mondiale numérique. Pour quelle raison principale ?
Mazars est un groupe international d’origine française, intégré – et non un réseau – de 20 000 collaborateurs et associés, présent dans 86 pays. L’ensemble des collaborateurs et associés partagent les mêmes valeurs, et les résultats financiers des entités du groupe sont mis en commun. Parmi ces valeurs communes, les technologies du numériques figurent en tête. Chez Mazars, le digital s’impose comme un vrai développeur de compétences : les ressources et savoir-faire des différents pays, notamment en Europe, génèrent de la valeur sur ces sujets, qui sont au cœur de nos ambitions stratégiques.
Un 21ème siècle américain ?
Quelle sera la place des États-Unis durant le 21ème siècle ?
Du 14 au 17 mars 2018, la 10ème édition du Festival de Géopolitique de Grenoble pose la question de la prééminence mondiale des Etats-Unis depuis près d’un siècle. Une domination qui se voit remise en question avec d'un côté, la montée en puissance de l'Asie notamment, et de l'autre, un protectionnisme porté par « l’America First » !
100 conférences, tables-rondes, débats et documentaires, au cours desquels experts en géopolitique et en relations internationales, enseignants-chercheurs, acteurs du monde économique, journalistes et experts américains viendront débattre de cette question. Avec des thèmes phares pour les entreprises : Face à la Silicon Valley, l’Europe peut-elle prendre le leadership de la révolution digitale ? Le « modèle américain » de management, vecteur d'influence ? Grenoble's irresistible appeal for US companies, researchers, students. Traverser l'Atlantique : de la conformité à l'éthique...
L’événement est gratuit et ouvert à tous sur inscription à Grenoble Ecole de Management, Sciences Po Grenoble, Librairie Decitre, Café des Arts, Maison de l’International
Festival de Géopolitique de Grenoble : 10 ans déjà !
Depuis sa création, le Festival s’attache à traiter tour à tour de problématiques géopolitiques globales et de problématiques pointues liées à un pays ou une zone géographique précise. Petit à petit, ce sont de véritables questions de société qui occupent les débats. Ouvert à tous les publics, le Festival attire des visiteurs toujours plus nombreux sur place ou en ligne grâce à la retransmission des conférences. De 500 participants en 2009, elles étaient 12 800 personnes en 2017. Après cette 10e édition, une page se tournera, le Festival évoluera.
« Après 10 ans de croissance continue, le Festival de Géopolitique est aujourd’hui un événement d’envergure européenne, connu et très apprécié. Nous sommes parvenus à répondre à notre mission initiale : créer un lieu de rencontres pour tous ceux qui s’intéressent aux questions internationales, un carrefour de toutes les géopolitiques accueillant un public large et des experts de tous horizons. Aujourd’hui, nous ressentons le besoin de fédérer d’autres types de publics, les décisionnaires économiques et politiques notamment. Parce que la mission d’une Grande Ecole de Management est de préparer l’avenir, nous voulons prendre de la distance avec la théorie pour donner au Festival une philosophie plus prospective et apporter un éclairage nouveau aux débats sociétaux » précise Jean-Marc Huissoud, directeur du Festival.